La campagne referendaire pour le referendum via le Traite constitutionnel europeen avait ete l’occasion d’un dechainement mediatique en faveur du « oui ». Le mouvement social contre le CPE parai®t faire l’objet d’un traitement plus christianmingle equilibre : les « anti-CPE » ont largement la parole et nos responsables syndicaux paraissent invites a s’exprimer.
Neanmoins, derriere votre facade immaculee se cache le ch?ur des editorialistes et chroniqueurs qui entonnent leur air prefere : notre destin, c’est la « reforme », et lui resister pourrait etre tragique. Pour convaincre leur public, ils agitent votre chiffre indiscutable. Indiscutable, sans doute, et partiel et trompeur [1] .
Le refrain mediatique : 1 jeune concernant quatre au chomage en France
Comme chacun le sait, ce paraissent les depeches de l’AFP qui informent d’abord des journalistes qui nous informent. Petit echantillon des chiffres foutu en circulation par l’Agence dans la version tronquee dont on verra plus loin qu’elle n’est pas la seule mais que bon nombre de journalistes se seront empresses de diffuser [2]
Dans une depeche datee du 25 mars – intitulee « Les travailleurs pauvres : une precarite qui effraie les Francais » – on va pouvoir lire :
« Notre taux de chomage en France des moins de 25 annees qui atteint 23 % reste un des plus eleves en Europe. »
– ou bien, dans une depeche datee du 31 mars – intitulee “Apres une baisse moderee en fevrier, quel avenir concernant le chomage en France ?” – l’AFP se bornait a indiquer : « Au coeur une politique de l’emploi de pallier ministre, avec le CPE, le chomage des moins de 25 annees demeure particulierement eleve, s’elevant a 22,2 % en fevrier. »
C’est donc cette information statistique objective et indiscutable que les medias dominants assenent au fil des mobilisations pour demontrer que, malgre la contestation du CPE et la gestion une crise via Dominique de Villepin, il y a votre gros probleme specifiquement francais de chomage des jeunes.
Des janvier, un chacun (17 janvier) joue le role de journal de reference et prepare les esprits : « Quand on a un taux de chomage des jeunes de 15 a 24 annees de 22 % (contre 15,1 % en Allemagne et 12,1 % au Royaume-Uni). ».
Le 1er fevrier, Bernard Revel, en fin connaisseur de la societe francaise, utilise votre chiffre magique pour convaincre les lecteurs de L’Independant du Midi des vertus du CPE : « Pour les 23 % de jeunes de moins de 26 annees actuellement au chomage, plus vaut sans doute un CPE que rien trop. »
Notre 7 fevrier, Herve Chabaud, dans L’Union, brandit le chiffre magique Afin de annoncer l’apocalypse que nous promet le refus une “reforme” : « claque d’avoir pres d’un petit concernant quatre au chomage ne prefigure-t-il pas le niveau general des sans-emploi demain si que dalle n’est fera afin d’offrir d’autres possibilites d’avoir du travail ? »
Toujours en fevrier, on pouvait lire dans la presentation de l’emission « Ripostes » intitulee « Jeunes : Attention, planete precaire » (derniere diffusion le dimanche 5 fevrier 2006), votre trouvaille destinee a donnner sa dimension vraiment dramatique (et sensationnelle) au mal qui frappe la jeunesse francaise : « Precarite de l’emploi : pres d’un quart des moins de 26 annees pointent a l’ANPE ».
A l’ANPE, vraiment ? Prendre le chomage et la precarite au serieux, votre n’est gui?re les transformer en farce et inviter a imaginer que en files d’attentes de l’ANPE se melent de jeunes adultes et des adolescents en quete d’emploi (aussi di?s qu’ils paraissent scolarises ?). et – par exemple ? – des enfants au regard perdu, des fois trop petits afin que leurs charmantes tetes blondes puissent seulement atteindre le bord du guichet.
En mars, des ondes vont repetant “le” chiffre. Ainsi, via RTL, le 7 mars, Jean-Yves Hollinger declare : « i l’origine, il y a un constat que personne ne conteste. Notre chomage des jeunes en France est beaucoup trop eleve, c’est l’un des plus eleves d’Europe . Meme l’opposition reste d’accord. » Notre 20 mars il donne a cette affirmation, dans le “Journal economique”, l’habillage savant qui convient Afin de repeter encore et encore “le” chiffre :
« Notre chambre de commerce de Paris vient de publier une etude comparative tres instructive. Dans le monde, la moitie des chomeurs a moins de 25 annees. Si vous prenez des grands pays industrialises, partout le chomage des jeunes est deux fois plus eleve, au minimum, que le chomage general. Aux Etats-Unis, 5% de chomeurs, 10% chez nos jeunes. En Espagne 8,5%, 18%. En Grande Bretagne, c’est pire, 5% de chomage, 14%, trois fois plus, Afin de les jeunes Britanniques. Et en France, comme nous avons l’un des chomages le plus eleve, celui des jeunes, lui aussi, est l’un des plus eleves, 23%. »
La presse ecrite, de son cote, intensifie son projet de « mise en perspective » .
Paris Match, le 9 mars, sous ma plume d’Axel de Tarle : « Non au C.p.e. ? Alors oui au chomage des jeunes ! Taux de chomage des jeunes : 25% . Neanmoins,, surtout, ne rien faire ! »